Bulletin d’information n°83/Oct2020

Sommaire

Édito

Chers Adhérents,

La COVID 19 a bousculé nos activités que nous avons dû suspendre pendant trois mois. Nous reprenons vie petit à petit.
Nous espérons que l’Assemblée Générale puisse avoir lieu avant la fin de l’année.

Au plaisir de vous y rencontrer nombreux. Bonne lecture à tous.

François Delahaye

Les bambous de « La Landille » : loin d’un Conte de Fées, une amitié s’est créée

Je ne sais pas ce que je vais écrire ?
Par contre, je me pose une question : comment d’un quartier ancien d’une commune, grâce à la compréhension des habitants – informés -, peut-on faire le tour du village, de la ville et tendre des liens d’amitiés, de paix, dans le monde ?

LES FAITS

ACTE 1 : lundi 18 février, Jean-Jacques, un copain, nous rend visite, nous demandant la possibilité de dons de bambous (quelques unités) en faveur d’une section de l’École de musique de Blanquefort. La demande est applicable durant cette période de vacances scolaires, dans des ateliers de travail, avec l’objectif d’une animation de fabrication d’instruments de musique, mode chilienne.

Françoise et moi ne pouvions, qu’avec grand plaisir, accepter cette demande formulée. En effet, dès ce triste jour du 11 septembre 1973, nous avons été solidaires du peuple chilien martyrisé et exilé. Après un printemps politique éclôt le 4 septembre 1970 par la victoire aux élections présidentielles d’ALLENDE, grâce à la prise de conscience politique et la participation active de tout un peuple, les libertés, la démocratie, furent instaurées. Mais, par un coup d’État de l’armée, le bombardement du palais présidentiel, le « suicide » d’ALLENDE, dès le 11 septembre 1973, suivit le triste hiver de la dictature du régime mise en place par le général Pinochet et qui dura de très longues années.

Mardi 19 février, le professeur de l’École de Musique de Blanquefort, Chilien, habitant Blanquefort depuis 1980, accompagné de Jean-Jacques et d’un musicien, Mauricio, venant du Chili, de la région du TARADACA, enseignant musical à la ville d’IQUIQUE, faisant une tournée éducative en Euro- pe, celle-ci débutant en France, viennent visiter « les possibilités existantes dans nos bambous… »
Dès leur arrivée, ils sont surpris par la densité de la surface occupée par les bambous, leur hauteur (certains mesurant plus de 20 mètres), d’une circonférence de 12 centimètres en moyenne, certains moins, certains davantage, avec du feuillage et des tiges toutes droites ; chez moi, le nombre de bambou est moindre, du fait que, mensuellement, j’arrache les racines. Ce lieu, que j’appelle « ma cathédrale », conserve la fraîcheur l’été et l’hiver ; c’est une zone plus tempérée. C’est à cet endroit que j’écris, je lis, je regarde la nature et les nombreux oiseaux : palombes, tourterelles, merles, grives, moineaux, rouges-gorges, mésanges, pin- sons, quelquefois mais de plus en plus rarement, des chardonnerets, etc. En fin de journée, quel plaisir d’écouter tous ces chants d’oiseaux qui ont des nids dans les haies et dans les arbres. Venus de Fongravey, sautant d’arbre en arbre, deux écureuils viennent se choisir, des noix pour le repas. Dans le ruisseau bordant l’ensemble des terrains, ruisseau venant des «sables», allant vers les marais après son passage sous l’avenue du 11 Novembre et s’écoulant dans le quartier des « Michels », la zone industrielle, les Jalles, puis se versant dans la Garonne, il arrive de voir des rats jouant entre eux. La nuit, bambous et acacias logent un hibou et des chouettes, séparées l’une de l’autre d’une certaine distance mais qui se causent entre elles par hululement. Quelle chance avons-nous d’habiter dans un tel endroit !

Nos amis me posent la question sur la provenance de ces bambous car … « ils ont des particularités ». Je l’ignore. Tout ce que je sais (dictionnaire « le grand Larousse -édition 2019) : » le bambou est une plante des régions tropicales et subtropicales, à tige cylindrique, creuse et ligneuse, aux nœuds proéminents, à croissance très rapide et qui peut atteindre 40 mètres de hauteur. Les bambous sont comestibles (pousses de bambous). Le bambou est cultivé comme une plante d’ornement et sert à l’ameublement et à la construction légère. »

Personnellement je ne connaissais l’utilisation du bambou que comme tuteur aux plants de tomates mais aussi pour les pêcheurs (à la «Régie Municipale du Gaz de Bordeaux», au cours des an- nées 1950 à 1960, nombreux chauffeurs de four -fabrication du gaz à partir du coke-, prenaient leurs congés au printemps, lors de la pêche, en particulier de l’alose. À cette époque, la Garonne était très poissonneuse ; tel n’est plus le cas maintenant, du fait de la pollution. Donc, pour la pêche, les pêcheurs avaient besoin de bambou solides et de forte taille pour accrocher les filets.

Ainsi venaient-ils « à la maison » pour leur grande satisfaction. Au cours des ans, j’ai dé- couvert un jeune gars, venu demander des bambous de taille moyenne, afin de se fabriquer des meubles pour sa chambre. Un jour, il m’a rendu visite pour me dire son succès au C.A.P. de menuisier, mais aussi pour montrer des photos de sa réalisation de meubles de chambre. Comme il est dit dans les métiers, « cela avait de la gueule ». Le jeune était tout content de mon compliment sincère.

Une autrefois, un autre jeune désirait des bambous afin de tresser des lianes servant ensuite à la fabrication de paniers ou de sacs à main …

Une autrefois encore, un jeune homme m’a demandé un certain nombre de gros bambous. N’en ayant pas suffisamment, il avait été, avec autorisation, en prendre chez les voisins ; son objectif était de se fabriquer un radeau. A-t-il réussi ? Pour quelle traversée ? Je ne parle pas des bambous coupés dans le village ayant servi de décorations pour les fêtes familiales : communions, baptêmes, mariages ; mais aussi lors des fêtes locales des quartiers de Blanquefort (la communale) : place de l’Église, la fête locale de Galochet comme encore la fête locale de Caychac et faisant suite, deux mois après, la fête des vendanges avec le char des vendanges, portant le roi et la reine des vendanges, entouré de l’orchestre, animant les bals des samedis et dimanches. Ce char ne venait pas à Blanquefort, il restait dans ses limites de Caychac.

Voilà, à ma connaissance, tous les services rendus par ces bambous.
Dans un reportage TV, j’ai découvert qu’en Chine (mais pas seulement), les tiges de bambou servent à fabriquer des échafaudages dans le BTP ; mais aussi, dans maints endroits isolés, le bambou sert à la construction de ponts facilitant, pour les populations, une libre circulation entre diverses localités, grâce à la réduction des parcours. Le bambou est aussi utilisé en Asie; en Inde, il sert à construire des habitations.

Ce que je peux dire du bambou, c’est sa prolifération. Plusieurs fois, au cours de l’année, je dois arracher les pousses et les racines. Les racines, d’ailleurs, ne sont pas profondes (30 centimètres maximum), mais elles sont aussi grosses que l’arbre que l’on voit et de plus, elles se dirigent dans plusieurs directions. De toutes ces racines de tailles très différentes, poussent des petites, le tout formant un épais tapis. Personnellement, je dois dire que pour effectuer ce travail, il me faut du temps et plusieurs jours. De plus en plus, les bambous sont solidaires car les racines sont attenantes les unes aux autres, bien soudées.

Le bambou est un « légume », bien cuisiné, la cuisine asiatique est excellente ; utilisé coupé en fines lames, il est comestible en soupe en salade etc…

Une anecdote. À la suite du décès de ma mère, début 1992, la maison est restée inoccupée de longs mois. Durant ce temps, les bambous poussaient mais, curieusement, le terrain restait propre. Interrogeant mes voisins, on m’a raconté: À Blanquefort, sont arrivées des familles asiatiques. Voyant les bambous, ne sachant à qui s’adresser, elles ont fini par oser les cueillir; elles ont eu raison, et je regrette de ne pas l’avoir su à ce moment-là car j’aurais donné mon accord afin qu’elles poursuivent leur « cueillette ». Oui, en effet, à un moment donné, ces familles n’ont plus osé. Hommes, femmes, enfants sautaient le fossé et cueillaient les pousses pour les manger comme nous le faisons pour les cèpes et les champignons. Si les Chinois aiment les bambous, depuis quelques années, ils adorent les bananes. Ils en sont producteurs mais la population atteignant 1 milliard 400 millions de personnes, la production est insuffisante ; ainsi, un gros commerce de bananes s’établit et la concurrence commerciale, sur le plan mondial, fit rage. Mais un autre problème apparut : l’ours divin des Chinois, le Panda, respecté depuis des siècles et très gourmand de la pousse de bambous. Actuellement, afin de faire face à la demande de ces gros nounours, les chercheurs sont en quête d’ une alimentation de remplacement afin d’éviter le manque à gagner… Nous n’allons pourtant pas pouvoir cultiver et vendre, sous appellation contrôlée … nos bambous de la Landille…

Le bambou a une qualité supplémentaire. Il est protecteur. Souvenez-vous de cette fable de Monsieur Jean de La Fontaine : Le Chêne et le Roseau. Cette fable indique que si le chêne est fort, quelle résistance a-t-il ? Par fort vent, il tombe, il se déracine. Le roseau, le bambou, de la même famille, par leur nombre, les bambous se serrent les uns contre les autres, se balancent, s’agitent, se courbent, se redressent à l’image des vagues de l’océan par mauvais temps. La tempête passée, le roseau est droit, debout ; le chêne meilleur souvenir de ce mauvais temps pour nous, en particulier aquitains, fut la grosse tempête de fin décembre 1999 : à Fongravey, nombreux étaient les arbres couchés au sol et de l’autre côté de la rue…; Par contre, tous les bambous étaient droits, quoique ayant perdu des feuilles.

Avec nos amis chiliens, je découvre que le bambou a une autre qualité : sa transformation en instruments de musique.

Mais voilà, nos amis chiliens ont leur passé, leur histoire, leur culture et leurs traditions ; vivant en collectivité, appliquant la démocratie, l’échange, la solidarité, vénérant la nature, possesseur des idées des Anciens, des chants, des danses, de la musique et des cérémonies du souvenir porteuses des pensées envers les morts, transmission de tous ces savoirs aux jeunes générations, en particulier la construction d’instruments musicaux tels que les flûtes de pan, les quenas etc… Tous ces actes sont efficaces pour tout un peuple : conserver démocratiquement sa culture ancestrale. Sans le savoir, modestement, dans nos bambous de « la Landille », nous apportons notre pierre dans le domaine de l’Éducation, de la Fraternité, de la Paix. Ici et ailleurs.

C’est ainsi que Mauricio, mandaté par ses congénères, fut le porteur de ces savoirs historiques. Suivant les traditions locales de cette région dont les sommets atteignent 5 180 mètres, région de grand froid et, en été, de chaleur, il a établi le contact direct et respectueux avec la nature en saluant nos bambous.

Entrant dans le carré de la bambouseraie, Mauricio, après s’être incliné, et déposé au bas du jardin, près des bambous. Trois feuilles séchées de coca, cueillies dans son village à 3 700 mètres d’altitude. Elles se sont bien posées signifiant, à ses dires, … que la nature de notre espace (l’espace correspond à notre terrain et à celui de ma cousine) a accepté la cérémonie qui devait avoir lieu. L’heure tournant, nous quittons les lieux avant l’arrivée des moustiques car ceux-ci aiment bien les feuilles protectrices des bambous dès que le soleil commence à baisser à l’horizon.

André Sourbé, « Les bambous de la Landille », octobre 2019

Biographie de Mme Marie Sidalie Caroline Mommeja

Elle est née à Aussillon, dans le Tarn, le 28 août1831. Elle est arrivée en 1865, venant de Saverdun, en Ariège, où elle dirigeait un orphelinat. Elle venait pour prendre la direction de la Maison de Santé Protestante (M S P) à Bordeaux. Elle devait faire un essai de 6 mois; elle y resta 36 ans.

L établissement ouvre le 15 octobre1863, il est en dehors de la ville, rue Cassignole. Il est entouré de peupliers et de saules pleureurs. D’abondantes sources d’eau jaillissent dans le voisinage; face à la maison coule la fontaine de Figuerie qui doit sa célébrité à la pureté de son eau vendue dans toute la ville. La M S P a une capacité de 20 lits faits de paillasses de maïs et d’un matelas de laine.

L’œuvre a pour but d’accueillir les marins protestants malades français et étrangers lors de leurs escales à Bordeaux; elle vise surtout à les détourner du prosélytisme exercé par les religieuses de l’hôpital municipal.

La M S P reçoit également et gratuitement les malades pauvres des deux sexes âgés de plus de 15 ans et appartenant aux diverses églises protestantes.

L’Établissement est reconnu d’utilité publique le 24 avril 1867.

Le personnel de la M S P est au début très restreint: une garde malade pour la maison, une autre pour les gardes malades en ville, une infirmière, une cuisinière et une aide cuisinière.

Pendant la guerre de 1870, ‘une ambulance’ de 25 lits est installée dans la M S P. Mme Mommeja ouvre le premier service de vaccination gratuite pendant une épidémie meurtrière de variole à Bordeaux; 600 personnes ont été vaccinées dans la maison, vaccination crée par le docteur Mousson.

En 1876, création d’un premier dispensaire libre et gratuit; chaque jour le docteur Demon a bien voulu assurer une consultation pour les pauvres. Dans le courant de cet exercice, plus de 120 personnes sont venues consulter et nous pouvons croire que bien des maladies graves ainsi soignées à temps ont pu être évitées.

Le dispensaire, dans le quartier des Chartrons, est très éloigné des hôpitaux et le nombre des consultations est en régulière augmentation de 200 en 1879 à 3 449 malades en 1894. En décembre 1887, une épidémie de typhoïde à Bordeaux remplit les salles.

En 1878 Mme Mommeja fait réparer les chambres des femmes et des hommes. Puis une maison spéciale est construite rue Laroche pour que les enfants y soient hospitalisés.

En 1882, la M S P ajoute à ses activités les soins aux enfants tuberculeux alors qu’à Arcachon s’ouvre le sanatorium du Mouleau pour les enfants, faibles rachitiques ou tuberculeux. La première année, la maison loue un chalet pour juillet et août. En 1884, la M S P loue un chalet à l’année, « Esperanza », pour 500 francs et un chalet plus grand pour les mois d’été. En 1887, les enfants au nombre de 39 ont bénéficié de ce séjour sous la surveillance de Mme Carde et du Docteur Lalesque. Ce changement d’air leur a donné une bonne santé dont ils avaient besoin. Chaque année nous en sommes nous-même fort surpris; le séjour de 3 semaines au grand air de la mer et de la forêt a produit sur ces enfants des effets merveilleux. Le 7 décembre 1923, l’œuvre du sanatorium du Mouleau est reconnue d’utilité publique.

Certaines des gardes malades, formées à l’école de la Source de Lausanne (école fondée par Mme Agénor de Gasparin), quittent très vite la M S P pour s’établir en ville ou elles sont mieux rémunérées, ce qui pénalise la M S P.

En 1884, Mme Mommeja ouvre une école de gardes malades. L’école accueille des élèves externes qui suivent des cours théoriques et quelques cours pratiques lors des consultations du dispensaire. Les cours sont gratuits et dispensés par Mme Gross Droz, diplômée de la Société de secours aux blessés Militaires et du Docteur Demon.

En 1895 / 1896, les rapports se tendent entre les membres du conseil d’administration et Mme Mommeja. Il est nécessaire d’avoir un chef chargé des soins et de la surveillance des malades. Les médecins le réclament; Mme Mommeja ne peut suffire à tout, elle et ses aides consacrent tout leur temps et toute leur énergie à venir au secours des pauvres. Toutefois Mme Mommeja tente de s’excuser et de défendre sa conception de l’exercice de la charité.

La M S P doit être aux yeux de Mme Mommeja un hôpital dans l’acceptation ancienne du terme : une maison ou l’on donne l’hospitalité, un lieu de refuge et d’asile.
En 1901 elle accepte de laisser sa place au Docteur Anna Hamilton.


Source livre d’Eveline Diebol « La Maison de Santé Protestante de Bordeaux » 1868 1934 et archives de l’école d’infirmière Flo- rence Nightingale à Bagatelle.

Marie-Hélène Roy

Les Chirurgiens – 2e partie

Paul d’Egine (620 – 690)

1 – Note biographique

Paul d’Egine est né vers 620 après J.C. (mort en 680 ou 690) dans la petite île du même nom, située à quel- ques kilomètres du Pirée. Il doit sa culture scientifique à l’Ecole d’Alexandrie [« Avec Paul d’Egine prend fin la grande lignée des médecins, qui depuis Hippocrate, ont marqué les principales périodes de la médecine grecque classique, hellénistique, byzantine » (P. Theil, 1965, p. 380)].

Paul est célèbre (dans le monde arabe en particulier) comme obstétricien mais également par son traité de Chirurgie [« Le livre de Paul est sans contredit, avec celui de Celse, tout ce que l’Antiquité nous a laissé de plus complet sur la médecine opératoire » (R. Briau, 1855, p. 53)].

2 – Sources bibliographiques

Nous avons utilisé la traduction du Traité de Chirurgie, par R. Briau, parue chez Masson, Paris, en 1855.

Paul d’Egine ; extrait de texte

(…) Chapitre LXXXVIII – De l’extraction des traits.
Le poète Homère fait voir que cette partie de la chirurgie, qui a rapport à 1’extraction des traits, est des plus nécessaires quand il dit “Le médecin est un homme qui en vaut plusieurs autres, quand il retire les traits et répand sur les blessures des remèdes adoucissants ».
Nous devons dire d’abord quelles sont les différentes espèces de traits. Ils diffèrent quant à la matière, quant à la forme, quant à la grandeur, quant au nombre, quant à leur disposition, quant à leur puissance.

Quant à la matière. Ce que nous appelons la hampe est en bois ou en roseau. Le trait lui-même est en fer, en airain, en étain, en plomb, en corne, en verre, en os, ou même aussi en roseau ou en bois. En effet, on trouve toutes ces différentes espèces principalement chez les Egyptiens.
Quant à la forme. Les uns sont ronds, les autres sont anguleux d’autres sont armés de pointes, et parmi ceux – ci il y a ceux qui ont des pointes, ceux qu’on appelle lonchotes (lancéolés) et ceux qui ont trois pointes. Il y en a qui sont hérissés de piquants et d’autres qui n’en ont pas. Parmi ceux qui en ont, les uns ont ces pi- quants tournés en arrière, afin qu’en voulant les retirer ils percent au contraire ; les autres ont les piquants tournés en avant, afin qu’en les poussant ils percent également; d’autres en ont qui sont tournés en sens contraires, à la manière des foudres, afin que quand on veut, soit les retirer, soit les pousser, ils s’enfoncent au contraire. Quelques – uns aussi portent une charnière au moyen de laquelle les piquants se tiennent ré- unis, puis quand on veut arracher le trait ces piquants se déploient et empêchent l’extraction.

Quant à la grandeur. Les uns sont grands et ont jusqu’à trois travers de doigt de longueur, les autres sont petits et ont un travers de doigt de long (…); d’autres ont une longueur intermédiaire.
Quant au nombre. Les uns sont simples, les autres composés, c’est – à – dire qu’on y ajoute des fers très ténus qui restent cachés dans le fond de la blessure quand on fait l’extraction du trait.

Quant à la disposition. Les uns ont la queue du fer insérée dans la hampe, les autres l’ont creuse pour recevoir la hampe ; et quelques – uns ont le fer fortement adapté à la hampe, d’autres l’ont plus faiblement fixé afin qu’ils se séparent quand on veut les arracher et que le fer reste dans la plaie.
Quant à la puissance. Les uns sont sans poison, les autres sont empoisonnés. Telles sont les différentes espèces de traits. Nous devons dire maintenant comment on les extrait chez ceux qui en sont blessés, soit pendant la guerre, soit en dehors de la guerre, volontairement ou involontairement, quelle que soit la circonstance, et quelle que soit la matière qui les compose.

Il y a deux manières d’extraire les traits des parties charnues ou en les arrachant ou en les repoussant. Chez ceux qui ont un trait enfoncé superficiellement, on l’extrait par arrachement. Il en est de même pour ceux qui sont profondément fichés, dans le cas où l’incision des parties opposées exposerait le blessé au danger d’une hémorragie ou à celui que crée la sympathie. On extrait en les repoussant les traits qui se sont fixés profondément quand les parties opposées sont minces, et quand il n’y a ni nerf, ni os, ni autre chose semblable qui empêche l’incision. Lorsqu’un os est blessé, on retire le trait par arrachement. Si donc le trait est visible, nous opérons aussitôt l’extraction s’il est caché, il faut, dit Hippocrate, quand cela se peut, observer le blessé dans la position même où il se trouvait quand il a reçu la blessure ; si cela ne se peut pas, nous le mettons dans une position aussi rapprochée que possible de celle où il était, après quoi nous nous servons de la sonde. Alors, si le trait est fixé dans la chair, nous l’extrayons avec les mains ou à l’aide du manche qu on appelle hampe, qui le plus souvent est en bois, s’il ne s’est pas séparé du fer ; si, au contraire, ce manche s’est séparé, nous opérons l’extraction avec un davier, ou une pince, ou un béloulque ( tire – trait ), ou quel- que autre instrument convenable ; et quelquefois nous incisons préalablement la chair si la blessure ne peut recevoir l’instrument. ou quelque autre instrument convenable ; et quelquefois nous incisons préalablement la chair si la blessure ne peut recevoir l’instrument. Mais si le trait s’est enfoncé jusqu’aux parties situées à l’opposé et qu’on ne puisse l’extraire par la blessure d’entrée, nous incisons les parties opposées et nous le faisons sortir par cette incision, ou en l’arrachant comme il a été dit, ou en l’y poussant à travers la blessure faisant attention de ne diviser aucun nerf, aucun tendon, aucune artère ni aucune autre partie essentielle ; car il est honteux pour nous de faire dans cette extraction un mal plus grand que le trait lui – même. Mais si le trait a une queue, ce que nous connaissons à l’aide de la sonde, nous y plaçons et y adaptons la partie femelle du diostre, et nous poussons le trait ; s’il est creux, la partie mâ1e. Si le trait nous paraît avoir quelques ciselures dans lesquelles d’autres fers ténus pourraient avoir été insérés, nous employons de nouveau la sonde, et si nous les trouvons, nous les enlevons d’après la même méthode. Si le trait, comme cela arrive, ayant des pointes dirigées en sens inverse, ne permet pas l’extraction, on doit inciser les parties qui l’entourent si aucun des organes essentiels à la vie ne se trouve dans le voisinage, et après avoir mis à nu le trait, nous l’extrayons sans rien dilacérer. Quelques – uns placent le tuyau d’un roseau autour de ces mêmes pointes et les arrachent ainsi entourées pour que leurs piquants ne déchirent pas les chairs.

Si la blessure n’est pas enflammée, nous la cousons et nous lui appliquons le pansement approprié aux plaies saignantes ; s’il y a de l’inflammation, nous la traitons par des lotions, des cataplasmes et d’autres moyens semblables. Quant aux traits empoisonnés, nous enlevons, si cela est possible, toute la chair qui a déjà été imprégnée par le poison. On la reconnaît parce qu’elle diffère de la chair saine ; en effet, elle est pile et livide, et elle paraît comme mortifiée. On dit que (…) les Dalmates enduisent les pointes avec (…) un poison qui tue quand il est en contact avec le sang des blessés ; mais mangé par eux, il n’est pas nuisible et ne leur fait aucun mal [ce passage est à rapprocher de celui de Celse où cet auteur écrit : “ la succion d’une plaie empoisonnée par morsure de serpent ou par les flèches telles que celles dont les gaulois se servent à la chasse, est innocenté; mais il faut que le suceur n’ait pas de plaies à la bouche ”].

Mais si le trait est fixé dans un os, nous faisons encore des tentatives avec les instruments, et si la chair y met obstacle, nous débridons et nous élargissons la plaie ; s’il est profondément fiché dans l’os, ce que nous connaissons parce qu’il est solide et que nos efforts ne l’ébranlent pas, nous enlevons avec un ciseau la partie osseuse qui est autour du trait, ou bien nous perforons d’abord tout autour avec une tarière si l’os est gros, et nous libérons le trait. S’il y a perforation de quelqu’un des organes principaux, tels que l’encéphale, le cœur, la trachée – artère, les poumons, le foie, l’estomac, les intestins, les reins, l’utérus ou la vessie, et que déjà apparaissent des signes mortels, et si surtout l’extraction doit causer une grande douleur, nous nous abstenons d’opérer, de peur que, outre qu’elle ne servirait à rien, nous ne fournissions aux ignorants un pré- texte de propos injurieux (…). Le diagnostic des blessures des organes principaux n’est pas difficile ; il ressort de la nature particulière des symptômes et des excrétions et aussi de la situation des parties. En effet, si les méninges sont blessées, il en résulte une douleur de tète intense, l’inflammation et la rougeur des yeux, la déviation de la langue et de l’intelligence. Si avec elles l’encéphale est en même temps blessé, il y a col- lapsus, aphonie, perversion des traits du visage, vomissement de bile, saignement de nez et d’oreille. Lors- que le trait s’est enfoncé dans les parties vides du thorax, l’air sort par l’ouverture si elle reste béante. Quand le cœur est blessé, le trait apparaît près de la mamelle gauche, non pas flottant dans le vide, mais comme fixé dans un corps solide et quelquefois marquant le mouvement des pulsations ; il y a écoulement d’un sang noir, s’il trouve un passage, refroidissement, sueur et lipothymie, et la mort arrive sans délai. Lorsque le poumon est blessé, s’il y a passage par la blessure, un sang écumeux s’échappe de la plaie, et s’il n’y en a pas, le sang est plutôt vomi ; les vaisseaux autour du cou se gonflent, la langue change de couleur, les malades aspirent largement et cherchent l’air frais. Quand le diaphragme est atteint, le trait parait enfoncé vers les fausses côtes, l’inspiration est grande et se fait avec gémissement et douleur dans la totalité des parties situées entre les deux épaules. Lorsque l’abdomen a été blessé, on sait quelle partie est atteinte d’a- près la nature des évacuations si la plaie est ouverte, soit que le trait ait été enlevé, soit que la hampe se soit brisée en dedans. En effet, de l’estomac, c’est le chyle qui sort ; des intestins, c’est la matière stercorale quelquefois aussi l’épiploon ou l’intestin sort du ventre ; si la vessie est blessée, c’est l’urine qui s’échappe. Ainsi donc, dans les blessures des méninges et de l’encéphale, nous extrayons le trait par la trépanation du crâne, comme nous le dirons tout à l’heure pour les fractures de la tête. Dans celles du thorax, si le trait ne cède pas à nos tentatives, nous l’extrayons au moyen d’une incision convenable dans un espace intercostal ou même en coupant une côte, après avoir placé dessous le méningophylax. Nous agissons de même pour les blessures de l’estomac, de la vessie et des autres organes profondément situés. Si le trait cède aux efforts

nous l’arrachons sans vaine recherche ; sinon, nous faisons une incision, et ensuite nous employons un pansement approprié aux plaies saignantes. Pour les blessures du ventre, il faut faire la gastrorraphie comme on l’a dit, si cela est nécessaire. Mais si le trait est enfoncé dans quelqu’un des grands vaisseaux, tels que les jugulaires profondes, ou les carotides, ou les grandes artères des aisselles et des aines, et que son extraction menace d’une abondante hémorragie, il faut d’abord lier les vaisseaux avec des fils de chaque côté de la blessure, et faire ensuite l’extraction du trait. Lorsque des parties sont clouées ensemble, comme par exemple le bras avec le thorax, ou l’avant – bras avec d’autres organes, ou les pieds l’un avec l’autre, si le trait ou le javelot n’a pas pénétré dans la totalité des deux parties, nous l’extrayons en le saisissant au dehors comme s’il n’avait blessé qu’une partie. Mais s’il a traversé la totalité des deux organes, nous scions le bois entre eux et nous retirons chaque portion d’une manière commode (…).

Abulcasis de Cordoue (936-1013)

1 – Notice biographique

(cette biographie doit beaucoup à l’article de Farid Sami Haddad (Abulcasis, Ab- bottempo, 1968, 3, pp. 22-25) dont une photocopie nous avait été fournie par notre regretté Ami Paul-A. Janssens, d’Anvers).
Abul-Quassim Khalaf Ibn Abbas Al-Zahrawi, comme l’indique la fin de son nom est né à Al-Zahra [« La Fleur », en arabe, nom donné à cette ville, par le khalife Abdur-Rahman (ou Adéramane, selon l’orthographe française) III (912-961), en honneur de son épouse qui s’appelait ainsi] , à quelques kilomètres au N-E de Cordoue [après la conquête de l’Espagne par les Arabes (de 711 à 714), Cordoue devint « l’Ornement du Monde », la capitale de l’empire musulman. Elle devait conserver cette prédominance jusqu’en 1226, date où, conquise par les Espagnols (Ferdinand III et Isabelle de Castille) elle perd son influence au profit de Salamanque. Au sommet de son apogée, Cordoue comptait près de 1 million d’habitants, 80 écoles et 50 hospices ! Sa bibliothèque (fondée par Hisham, fils d’Abdur-Rahman I) contenait plus de 600 000 ouvrages, répertoriés dans un catalogue de 44 tomes! ] d’où le nom d’Abulcasis de Cordoue, par lequel il est le plus communément désigné, en Europe [II est connu également sous les noms de Al-Zahrawi, Albuca- sis,Bulcasim et Bulcasi] . Il est considéré comme le plus grand chirurgien de son époque et certainement le plus grand chirurgien arabe de tous les temps. Son œuvre médicale et chirurgicale est parfaitement connue à travers l’ouvrage qu’il a écrit, Al-Tasrif [le titre complet est Al-Tasrif liman ajiza an Al-Ta’lif] , une encyclopédie de 1 500 pages divisée en 30 livres, dont le dernier consacré entièrement à la chirurgie est le plus fameux, et celui qui a eu le plus d’influence sur tout le Moyen Âge [traduit en latin par Gérard de Crémone (1114-1187), il y eut pas moins de 10 éditions dans cette langue entre 1497 et 1544. Tous les chirurgiens médiévaux, postérieurs à Abulcasis, tels Roger de Parme, Guillaume de Salicet, Henri de Mondeville, Guy de Chauliac (parmi ceux que nous avons retenus) ont utilisé son œuvre : Guy, par exemple, le cite 175 fois !]. Le livre 30 contient, en plus du texte, la représentation d’instruments chirurgicaux la plus ancienne- ment connue dans toute l’histoire médicale. La plupart de ces instruments ont été inventés par Abulcasis lui- même. Il est bon de rappeler cependant, quelles que soient les qualités réelles du chirurgien arabe, les em- prunts non négligeables qu’il a faits (sans le signaler !) à l’œuvre de Paul d’Egine!

2. Sources bibliographiques

Pour notre travail, nous avons utilisé la traduction de L. Leclerc, 1861, J.B. Baillière, Paris.

Abulcasis de Cordoue extrait de texte

De l’extraction des flèches

Les flèches varient quant à leurs formes et quant à la région du corps où elles seront fixées.
Quant à leurs formes, il en est de grandes et de petites, à fer plein et à fer creux ; il en est qui ont trois, qua- tre et six angles ; il en est qui ont des appendices.
Au point de vue des organes qu’elles atteignent, on peut les diviser en deux classes. Ou bien elles atteignent des organes importants ayant des cavités, comme le cerveau, le cœur, le foie, les poumons, les intestins, les reins, la vessie, etc. Si une flèche pénètre dans l’un de ces organes et que vous voyez apparaître les signes de mort, tels que nous les exposerons plus tard, il faut vous abstenir d’en pratiquer l’extraction. Le plus sou- vent, en effet, ces cas sont mortels. Si vous ne voyez pas apparaître ces symptômes fâcheux, et que la flèche n’ait pas pénétré dans la profondeur des organes, il faut l’extraire et panser la blessure.
Tels sont les symptômes qui se présentent quand une flèche a pénétré dans le cerveau en traversant le crâne et la membrane qui recouvre le cerveau. Il survient une violente céphalalgie, de l’étourdissement, du vertige, l’injection et l’inflammation des yeux, la rougeur de la langue, des convulsions, la perversion de l’intelligence, des vomissements biliaires ; souvent il s’écoule du sang par les narines ou par les oreilles ; souvent la parole est coupée et la voix fait défaut. Il s’échappe aussi de la plaie quelque chose de blanc et de mou comme de la bouillie, ou bien encore comme de la lavure des chairs. Si vous voyez apparaître ces symptômes, abstenez-vous de tout traitement et ne cherchez pas à extraire la flèche si elle ne sort pas d’elle-même. Tels sont les symptômes quand la flèche est tombée dans le cœur. Elle a pénétré près de la mamelle gauche. On sent qu’elle est fixée dans un corps solide et non pas dans le vide, souvent la flèche a des mouvements pareils aux mouvements pulsatoires ; un sang noir s’écoule de la blessure ; les extrémités se refroidissent, il survient une sueur froide et l’évanouissement. Sachez que la mort est alors inévitable. Tels sont les symptômes de la pénétration de la flèche dans les poumons. Du sang écumeux s’échappe de la blessure ; les vais- seaux du cou se gonflent, le malade change de couleur, sa respiration est haute et il cherche à respirer un air frais.

Si la flèche atteint la membrane (le diaphragme) qui se trouve dans la poitrine, son entrée sera rapprochée des fausses côtes, la respiration sera haute et s’accompagnera d’une violente douleur, il y aura de l’anhélation et des mouvements de toutes les parties situées entre les épaules.

Si la flèche a pénétré dans le foie, il surviendra une violente douleur et il s’échappera de la blessure du sang dont la rougeur rappellera celle du foie. Si la flèche a pénétré dans l’estomac, souvent il s’échappera de la blessure des aliments non digérés et le diagnostic sera facile.

Si la flèche a pénétré dans l’abdomen et s’y est fixée, s’il s’échappe de la plaie des matières stercorales, des portions d’épiploon, des intestins dilacérés, alors il ne faut songer ni au traitement ni à l’extraction de la flèche. Si la flèche a pénétré dans la vessie, de manière à laisser couler l’urine et à sortir en partie, le malade souffrira violemment et sera voué à la mort. . Quant aux autres parties du corps telles que la face, le cou, la gorge, l’épaule, le bras, l’épine dorsale, la clavicule, la cuisse, la jambe, etc., la guérison est généralement possible, si la flèche n’a rencontré ni artère ni nerf, et si elle n’est pas empoisonnée.

Je vous rapporterai plusieurs de mes observations relatives aux flèches pour vous guider dans votre pratique.

Or donc, un homme fut atteint d’une flèche à l’angle de l’œil et près la naissance du nez. Je la lui retirais par le côté opposé au – dessous du lobule de l’oreille. Cet homme guérit, sans qu’il lui survienne d’accident du côté de l’œil.
J’en retirai une autre à un juif, qui avait pénétré dans la cavité orbitaire par dessous la paupière inférieure : elle s’était enfoncée au point que je ne pus en saisir que la petite extrémité par laquelle elle s’unit au bois. C’était une grande flèche, lancée par un arc turc, en fer carré et lisse, n’ayant pas les deux oreillons. Le juif guérit et il ne lui survint à l’œil aucun accident.

J’en arrachais une autre de la gorge d’un chrétien. C’était une flèche arabe, à oreillons. J’incisais par- dessus, entre les veines jugulaires; elle avait pénétré profondément dans la gorge : j’opérai avec précaution et je parvins à l’extraire. Le chrétien fut sauvé et guérit.
Je retirais une autre flèche qui avait pénétré dans le ventre d’un homme que je croyais perdu. Cependant, après une trentaine de jours, son état n’avait pas changé : j’incisais sur la flèche, et je fis si bien, que je l’extirpais, sans que le malade s’en ressente depuis.

J’ai vu quelqu’un qui avait reçu une flèche dans le dos. La plaie se cicatrisa, et sept ans après la flèche sortir par la fesse.
J’ai vu une femme qui avait reçu une flèche dans le ventre. La flèche resta et la plaie se cicatrisa. Cependant la femme n’éprouva ni gène ni douleurs, et n’en vaqua pas moins à ses occupations habituelles.

J’ai vu un homme dans la face duquel une flèche avait pénétré. La plaie se cicatrisa et la flèche resta sans que pour cela le sujet souffrit beaucoup. J’ai vu plusieurs cas de ce genre.
J’ai aussi extrait une flèche à un des officiers du sultan. Elle était entrée par le milieu du nez en inclinant un peu à droite ; elle était tellement enfoncée qu’elle avait complètement disparu. Je fus appelé pour le soigner, trois jours après l’accident. Je trouvai la plaie très étroite ; je l’explorais avec un stylet fin, mais je ne sentis rien. Cependant, le malade éprouvait de la gêne et de la douleur à droite, au-dessous de l’oreille. Je pensai que c’était la flèche, j’appliquai donc des cataplasmes faits de substances digestives et attractives, espérant en moi-même que l’endroit allait se tuméfier, que j’aurais des indices de la flèche et que je pourrais inciser par-dessus. Mais rien ne survint qui pût m’indiquer où elle était logée, je continuai l’application des cataplasmes pendant plusieurs jours et rien de nouveau ne survint. Cependant la plaie s’était cicatrisée et le malade resta quelque temps à désespérer de son extraction, quand un jour la flèche se fit sentir dans le nez. Il m’en fit part et j’appliquai, pendant plusieurs jours, un médicament irritant et caustique, de telle sorte que la plaie s’ouvrit. Je l’explorais et je sentis la petite extrémité de la flèche, le point où elle s’attache au bois. Je continuai à élargir l’ouverture par l’application du caustique, si bien que j’aperçus le bout de la flèche. Il y avait environ quatre mois que je traitais le malade. Enfin quand la plaie fut assez élargie et que je pus introduire des tenettes, je l’attirai, je la fis branler mais sans parvenir à l’extraire, je ne cessai pourtant d’employer tous les moyens, tous les artifices et tous les instruments, jusqu’à ce qu’un jour l’ayant saisie avec d’excellentes pinces dont je donnerai la description à la fin du chapitre, je la fis sortir et je pansai la blessure. Quelques médecins prétendent que les cartilages du nez ne se réunissent pas ; ils se sont néanmoins réunis, la plaie se cicatrisa, le sujet guérit parfaitement sans éprouver aucune gêne. Je veux vous enseigner comment se fait l’extraction des flèches en certains cas, afin que ce soit pour vous un guide et une règle dans les cas dont je n’aurais pas parlé.

Les différents procédés d’extraction des flèches ne peuvent être décrits et exposés dans les livres. Cependant un praticien habile saura agir du petit au grand et par le connu il saura apprécier l’inconnu. Il instituera des méthodes nouvelles et des instruments nouveaux dans les cas extraordinaires, s’il s’en présente, en s’inspirant de son art lui-même. Je dis donc que l’extraction des flèches, qui ont pénétré dans les organes et s’y sont fixées, peut se faire de deux manières, soit en tirant par le point où elles sont entrées, soit en tirant par le côté opposé.

Quant au procédé d’extraction par le côté d’entrée, si les flèches se présentent dans un endroit charnu, il faut tirer dessus et les extraire.

Si la flèche était empoisonnée, vous enlèverez toutes les chairs avec lesquelles elle aura été en contact, si cela vous est possible. Vous panserez ensuite avec des médicaments convenables.
Si la flèche a pénétré dans la poitrine, dans l’abdomen, dans la vessie ou dans le flanc, mais peu profondément et de manière à être perçue avec le stylet si l’incision est possible, il faut inciser, en ayant soin de n’intéresser ni veine ni nerf, puis on l’extraira. On appliquera une ligature sur la plaie, s’il est nécessaire, ensuite on pansera jusqu’à la guérison. Pour extraire les flèches on utilisera des pinces dont les extrémités ressemblent à un bec d’oiseau [tenailles d’Abulcasis]. Elles seront cannelées comme des limes, afin qu’en saisissant une flèche ou tout autre chose, on ne la lâche pas. On en aura de toutes dimensions suivant les dimensions de la flèche et de plaie. (On utilisera également) des repoussoirs [impulsoirs], creux ou pleins, ce dernier aura l’extrémité pleine comme un stylet, pour faciliter son introduction et son action sur les flèches creuses.

Suite du bulletin n°82 par E et F. Delahaye

Cora Marton

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